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Par : Lou
Publié : 20 février 2011
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Le Jour Se Lève, ou comment un chef-d’oeuvre censuré devient un classique.

Un homme sort d’un appartement en s’agrippant le ventre, il a été touché par une balle, il dégringole les escaliers et meurt. On ne sait pas pourquoi cet homme a été tué, mais l’on apprend que le meurtrier est un dénommé François. Grâce à une succession de flash-back, tout le cheminement de l’histoire est retracé et l’on comprend ce qui a poussé François, un simple ouvrier, à commettre ce crime...

 

Les chemins de François et Françoise se croisent par hasard ; il tombe amoureux d’elle. Un soir, François rencontre Clara, partenaire de Valentin dans son numéro de dresseur de chiens. C’est ce soir-là que tout va basculer.

Le Jour Se Lève est un film en noir et blanc sorti le 9 juin 1939, dont le réalisateur est Marcel Carné.

- Scénario : Jacques Viot
- Dialogues  : Jacques Prévert
- Musique : Maurice Jaubert

Distribution :

Jules Berry : Valentin, dresseur de chiens
Jacqueline Laurent : Françoise
Jean Gabin : François, ouvrier
Arletty : Clara, partenaire de Valentin

Un film né un peu par hasard.


Jacques Viot était le voisin de Marcel Carné. Sachant qu’il était cinéaste, Viot décide d’aborder Carné un jour alors qu’il le voit sortir de chez lui. Il lui demande de lire l’ébauche d’un scénario intitulé Le Jour Se Lève d’environ trois pages ; cela ne lui prendra pas longtemps. Dans un premier temps, l’intrigue ne séduit pas tellement Carné, mais il est très attiré par construction en flash-back. A partir de ce moment, Carné demande à Prévert d’abandonner le projet en cours pour se lancer dans la création du Jour se Lève.

Ce film aura été la 4ème collaboration entre Carné et Prévert,

mais ne sera pas la dernière, il y en aura encore trois autres dont Les Visiteurs du Soir (1942). Prévert en écrira encore les dialogues, mais aussi le scénario, Trauner en créera également les décors et on y retrouvera Arletty et Jules Berry.

Les dialogues de Prévert donnent une dimension humoristique et poétique au film.

Lors de la première rencontre entre François et Françoise à l’usine, celui-ci dit : "lui il boit du lait comme les vaches mangent du raisin". Clara déclare à François lors de leur première rencontre : "Vous avouerez qu’il faut avoir de l’eau dans le gaz et des papillons dans le compteur pour avoir passé trois ans avec un type pareil !"

Valentin, François et Clara

Affrontement de François et Valentin

Prévert joue avec l’opposition des langages de Valentin et de François lors de leurs confrontations, Valentin qui tient des discours fleuris et manipulateurs alors que François parle peu et veut vite en venir au contact physique.

Un film entièrement tourné en studio.

Trauner a dû respecter les exigences de Carné et concevoir la chambre où loge François avec ses quatre murs et non comme il on a l’habitude au cinéma, seulement trois pour permettre de laisser de l’espace à l’équipe technique. Celle-ci a donc dû travailler dans cet espace étroit en fonction du jeu de Gabin.

Valentin, Clara et François dans la chambre de ce dernier. On remarque au-dessus de la cheminée, un miroir, objet symbolique du film dans lequel François se parle à lui-même à la façon d'un schizophrène... (cf : Ciné-lycée, fiche pédagogique)

Valentin, Clara et François dans la chambre de ce dernier. On remarque au-dessus de la cheminée, un miroir, objet symbolique du film dans lequel François se parle à lui-même à la façon d’un schizophrène... (cf : Ciné-lycée, fiche pédagogique)

François et Françoise face au miroir. L'ours en peluche est à Françoise ; elle le compare à François. L'ours et le miroir seront criblés de balles lors de la fusillade de la police. Symbolique !

François et Françoise face au miroir. L’ours en peluche est à Françoise ; elle le compare à François. L’ours et le miroir seront criblés de balles lors de la fusillade de la police. Symbolique !

Mais un film sorti au mauvais moment,

car en 1939, sous le régime de Vichy, certaines scènes "trop osées" sont censurées, notamment un plan où l’on voit Arletty nue sous la douche.

Arletty dans sa douche

En fin de compte le film, après avoir été interdit aux moins de seize ans, sera entièrement censuré par le régime de Vichy, car jugé trop "démoralisant" en temps de guerre.

De plus, le public de l’époque qui n’est pas encore familier du procédé des flash-back, n’est pas du tout réceptif et ne les comprend pas.

C’est pour cela qu’avant que le film commence, un panneau annonce l’intrigue pour faciliter la compréhension des spectateurs face à cette innovation.

Barbara Bel Geddes et Henri Fonda

Le remake américain du Jour se Lève, The Long Night, n’est pas une grande réussite, comparé au chef d’oeuvre de Carné. Henri Fonda prend la place de Gabin, Barbara Bel Geddes celle de Jacqueline Laurent.

En définitive, après des débuts pour le moins difficiles, Le Jour Se Lève de Marcel Carné est maintenant devenu un classique du cinéma français.