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Publié : 27 novembre 2016
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Tamara Héraud et Léna Conré co-signent un conte moderne et désabusé, qui leur vaut le sixième accessit ex-aequo

Sixième Accessit ex-aequo
PARTIR POUR MIEUX REVENIR
Tamara Héraud et Léna Conré, élèves de seconde au lycée Grandmont, Tours.


Vivant à Bordeaux dans un appartement proche du campus universitaire, cela fait deux ans que Hugo fait des études de droit. Hugo est un jeune homme discret mais qui pour autant, ne passe pas inaperçu auprès des filles. Il est grand, bronzé et a les yeux marron, cependant il reste célibataire. Il est plutôt populaire dans ce campus et cela ne lui déplaît pas. Il a eu de nombreuses aventures avec des filles mais jamais rien de sérieux.
 Un vendredi, Hugo arriva au campus et comme chaque matin il alla à la cafétéria pour prendre un café. Il aperçut une jolie jeune femme qu’il ne connaissait pas. Elle était brune, petite et mate de peau. Durant le cours qui suivit, il parla d’elle à son meilleur ami, Thomas, qui lui donna le conseil d’aller lui parler. Il retourna donc à la cafétéria le lundi mais elle n’était pas là. Le jour suivant non plus, alors il se découragea.
 Trois jours plus tard, Hugo buvait son café quand il entendit la porte de la cafétéria s’ouvrir. Il se retourna et vit la jeune fille du vendredi précédent. Prenant son courage à deux mains, il alla lui parler. Elle s’appelait Laiela. Après avoir discuté pendant un long moment, ils se donnèrent rendez-vous le lendemain midi, dans le petit snack d’en face.
 Pendant quatre semaines, ils prirent l’habitude de se retrouver tous les midis pour déjeuner ensemble. Un mardi, Hugo proposa à Laiela de l’accompagner au cinéma et d’aller dîner ensuite au restaurant. Il passa chercher Laiela chez elle à vingt heures. Quand elle sortit, Hugo eut un moment d’absence en la voyant. Il la trouvait si jolie. Hugo lui dit « Bonjour » d’un air plutôt gêné. Elle lui répondit « Salut » en souriant et en s’asseyant du côté passager. Le trajet se passa dans une ambiance plutôt étrange, personne n’osait vraiment entamer la conversation. Une fois qu’ils furent arrivés au cinéma, Hugo paya les deux places. Ils choisirent d’aller à la séance du dernier film d’horreur à l’affiche. Hugo pensait que Laiela aurait peur et qu’elle en profiterait donc pour se blottir contre lui. Cependant la séance ne se passa pas du tout comme il l’avait prévu. Laiela adorait les films d’horreur. Elle ne tressaillit pas même durant les moments les plus effrayants et elle sortit de la salle tout excitée. Lorsqu’ils quittèrent le cinéma, Hugo se rendit compte qu’il n’avait pas encore choisi dans quel endroit il allait inviter Laiela à manger. Alors il décida de l’emmener dans son restaurant préféré, un petit italien très chic qui se trouvait à cinq minutes à pied. Pendant le trajet, le seul sujet de conversation fut le film. Hugo fut surpris par la manière dont Laiela avait analysé chaque passage avec un luxe de détails. Elle ne s’arrêtait pas de parler, ce qui le fit rire.
 Une fois au restaurant, leur conversation dériva sur leur orientation à l’université.
-Tu étudies dans quelle université au fait, car je n’ai jamais eu l’occasion de te poser la question ? Demanda Hugo, intéressé.
Laila redescendit directement de son monde pour revenir à la réalité et rougit en lui répondant : « Oh ! Je suis à Sciences Po, option Commerce international. Et toi ? »
« Je suis à l’université de droit qui est juste à côté de la tienne, c’est sûrement pour cela que nous allons à la même cafétéria... » Lui répondit Hugo, toujours aussi sérieusement.
 Laiela était très timide, Hugo l’avait déjà remarqué à la cafétéria, il ne l’avait jamais vue en compagnie de garçons, ni de filles. Hugo ne se reconnut pas, il commençait à ressentir une forte attirance pour cette fille, c’était la première fois.
Plus le repas avançait, plus Laiela se décontractait, faisait des blagues et riait. Elle avait l’impression de mieux le connaître, ce qui la mit en confiance. Hugo régla l’addition sans donner à Laiela le temps de s’opposer à cette décision. Lorsqu’ils arrivèrent à hauteur de la voiture, Laiela se retourna et se retrouva nez-à-nez avec Hugo. Elle se sentit rougir. Il la prit par la taille puis elle dit tout doucement :
-Pourquoi moi ?
En guise de réponse, il l’embrassa. Il la raccompagna devant son immeuble et elle rentra rapidement chez elle sans même lui dire au revoir.
Le lendemain, lorsque Hugo croisa Laiela, il la prit dans ses bras et l’embrassa.
 Pendant deux ans, leur relation fut très calme et ils passaient la majeure partie de leur temps ensemble. Une rumeur sur l’arrivée d’une nouvelle candidate aux présidentielles, Maryline Sergent, courait les rues. Elle avait tenu, il y a quelques années, des propos xénophobes. D’après Le Monde, elle mettrait en place des réformes encore inconnues du monde médiatique. La France était en état de crise, alors on pouvait s’attendre au pire.
20 mars 2030, résultats des présidentielles : Maryline Sergent est élue présidente.
 Cela faisait un mois que Mme Sergent était au pouvoir. À part certains discours xénophobes, rien n’était alarmant. Cependant Laiela restait peu confiante sur les futures réformes. Petit à petit la Présidente en mit en place quelques-unes. Jusqu’au jour où elle annonça sur le plateau télé auquel elle avait été invitée, que la France n’accepterait plus aucune personne n’ayant pas la nationalité française sous peine d’emprisonnement. Chaque étranger devait faire le choix entre partir de lui-même ou rester en France en prenant le risque de se faire arrêter. Par la suite, des manifestations furent organisées. D’après de ce que les médias disaient, il n’y avait pas grand monde dans les rues. La France que l’on connaissait avait changé, elle était devenue une France raciste et égoïste. Hugo et Laiela prirent la décision de ne pas risquer l’emprisonnement de Laiela. Ils n’étaient pas prêts à cette réforme, mais furent obligés de s’y plier, comme tous les autres. Les cinq nuits qui suivirent cette annonce furent les nuits les plus longues pour Hugo. Il réfléchissait à toutes les solutions de garder Laiela près de lui. Aucune ne tenait la route. Il pensait à sa vie avant qu’il ne rencontre Laiela, et ne voulait pas la retrouver.
 Le jour du départ arriva, toutes les affaires étaient prêtes. Hugo et Leila se dirent un dernier au revoir. La dernière phrase prononcée fut celle de Hugo qui dit :
-Je te le promets, on se retrouvera, on s’appellera, c’est promis.
 Pendant les trois premiers mois, la promesse fut tenue. Ils s’appelaient presque toutes les semaines. Laiela continuait ses études à distance. D’après Hugo, une police aurait été mise en place et fouillait chaque maison pour qu’aucun étranger ne reste plus. Il lui disait aussi que certaines manifestations étaient mises en place pour se débarrasser de Maryline Sergent. Durant les mois qui suivirent, les appels furent moins fréquents et écourtés. Hugo avait toujours autre chose à faire et ne la rappelait jamais. Ils ne perdaient pas complètement contact car Laiela se tenait toujours aux nouvelles, mais lui, ne faisait aucun effort. Ils ne s’appelaient plus qu’une fois tous les deux mois.
 Au bout de deux ans, la France se révolta contre la présidence de Mme Sergent. Après de nombreuses grèves, manifestations et certaines menaces, Mme Sergent fut exclue du pouvoir par le Sénat. Après un referendum, les étrangers furent autorisés à revenir en France. Laiela n’avait plus aucune nouvelle de Hugo depuis six mois. Elle avait arrêté de l’appeler et il n’avait pas réagi. Elle décida de rentrer en France, ce qui lui permettrait de reprendre de réelles études et d’avoir une explication avec Hugo.
 Lorsqu’elle arriva à Bordeaux, elle trouva le plus rapidement possible un petit hôtel où elle pourrait séjourner le temps de trouver un appartement. Le lendemain, elle se dirigea vers la faculté de droit et attendit devant en espérant croiser Hugo. Comme ce ne fut pas le cas, elle se dirigea vers la cafétéria pour acheter un petit en cas. Quand elle arriva à proximité de celle-ci, elle aperçut Hugo à travers la vitre, une fille accrochée à son bras. Il avait toujours la même assurance. Il tourna la tête vers l’extérieur et son sourire s’envola lorsqu’il se rendit compte que c’était Laiela qui était en face de lui. Il repoussa la fille qui était collée à lui. Il fit la bise rapidement à Laiela et lui demanda de le suivre dans sa voiture. Elle ne comprit pas pourquoi mais le suivit tout de même. Il lui dit que la fille n’était qu’une amie, il mentait bien évidemment mais elle le croyait. Il lui dit aussi qu’il ne l’avait jamais oubliée, seulement que la distance lui avait fait du mal. Laiela était tellement amoureuse qu’elle n’y vit que du feu et lui fit confiance. Il lui proposa d’aller chez elle. Elle le conduisit donc jusqu’à l’hôtel. Hugo avait tenu à lui tout seul la conversation pendant le trajet en lui répétant qu’il s’excusait vraiment. Ils passèrent la journée dans la chambre à se raconter leur nouvelle vie. Ils partagèrent une nuit d’amour.
 Lorsque Laiela se réveilla, le jour était déjà levé et le soleil éclairait toute la petite chambre d’hôtel. Hugo n’était pas là mais il avait laissé un mot disant qu’il était allé chercher de quoi déjeuner. Laiela était si contente de l’avoir retrouvé ! Mais Hugo ne revint pas. Elle ne le chercha plus.
 Un mois et demi plus tard, Laiela découvrit qu’elle était enceinte. L’enfant venait forcément de Hugo, elle ne lui avait jamais été infidèle. Elle l’appela de nombreuses fois, alla devant son université, à la cafétéria. Aucune trace de Hugo, il avait disparu. Les parents de Laiela n’acceptèrent pas de l’aider à financer les besoins de l’enfant, sachant qu’il se retrouvait sans père. Ils coupèrent les liens avec leur fille. Laiela se retrouva seule, sans argent, sans logement fixe avec un bébé qui allait naître. Elle fut obligée d’arrêter ses études et trouva de petits travaux. L’homme qui lui avait donné tant de bonheur durant deux années venait de gâcher le reste de sa vie, en seulement une nuit. Elle regrettait tant d’avoir cédé aussi vite, mais elle l’aimait… Il était trop tard pour revenir en arrière, le bébé allait naître.