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Publié : 27 novembre 2016
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Deuxième prix LEP pour Lynda Heu, auteur d’une nouvelle fantastique où la frontière entre réalité et rêve s’efface.

Deuxième Prix LEP, Mémoire Oubliée
Lynda Heu, élève de 1° Bac Pro au Lycée des métiers Jean Mermoz Bourges

Où suis-je ? Qu’est-ce que je suis ? C’est comme si je n’étais pas dans la réalité, c’est comme si j’étais endormie. C’est ce que je me demandais quand je me regardais dans ce miroir brisé en mille morceaux sur le sol. Tout semblait flou et incompris mais ceci était ma réalité. Je regardais autour de moi, j’étais dans une pièce sombre.
Qu’as-tu fait … ?
Ceci était les dernières paroles de mon frère aîné Gin.
En voyant Gin par terre qui se noyait dans cette mare de sang rougeâtre, je reculais jusqu’à que je me retrouve complètement dos à dos contre le mur. Je ne comprenais pas… Qu’est-ce que j’avais fait ? Pourquoi Gin était-il en sang ? … Tout était si calme, pas un seul bruit ne résonnait dans la pièce. Comment est-ce que j’ai pu me retrouver dans cet endroit inconnu. Il faisait très sombre, on aurait dit une chambre froide avec des miroirs collés aux quatre murs. Mais ce qui était étrange c’est qu’il n’y avait pas que le corps de mon frère qui était éparpillé par terre mais celui de dizaine de gens… Soudain j’entendis un grincement venant de derrière, je collai mon oreille contre le mur, mon visage se crispa. Des hurlements, des cris, des pleurs j’entendais tous ses gens derrière ce mur. Je me disais qu’il fallait partir d’ici au plus vite et appeler la police !
Je sentais cette vague sensation qui me faisait froid dans le dos, mon cœur battait la chamade. Je paniquais de plus en plus en voyant tous ces morts.
Je me regardais une nouvelle fois dans ce miroir qui reflétait mon visage, mes vêtements, mes mains et mon visage, ils étaient complètement couverts de sang. C’est à ce moment-là que j’ai compris à quel point j’étais devenue une créature cruelle… Une tueuse. Je devenais complètement folle.

Tout avait commencé il y avait six mois, je sortais tout juste de mon coma d’il y a un an déjà, j’avais perdu une partie de mes souvenirs, je n’étais pas tout à fait rétablie. Tout ce dont je me souvenais c’était mon accident mortel avec Wali un ami très proche de la famille d’après Gin mon grand frère. Mon petit frère Teke voulait absolument voir notre mère décédée depuis sa naissance, au cimetière, car cette journée-là c’était la fête des mères. Il fallait au moins quarante minutes pour y aller, mais ce soir-là, il pleuvait abondamment et nous avions eu un accident de voiture. Wali avait percuté une autre voiture à cause des routes glissantes. Je me souvenais cette journée-là, et des voix, des cris, des pleurs, cette lumière et le pimpon des ambulances. Et cette sensation que j’avais eue après mon accident, c’était comme si quelque chose en moi avait changé, comme si ce corps ne m’appartenait pas, comme si j’étais endormie au fond de moi et que je ne pouvais pas me réveiller de ce sommeil qui durait indéfiniment. C’était une sensation tellement horrible. Comme si cette partie de moi se détachait et voulait créer une nouvel ère pour enfin oublier ce drame. Mais cela empirait de plus en plus, plus je me souvenais de cet accident plus j’étais renfermée sur moi-même. Traumatisée, je faisais des cauchemars tous les soirs et je repensais à mon petit frère et Wali qui eux étaient encore dans le coma. Tous les jours, je leur rendais visite leur prenais la main et leur parlais de ma journée, de ma tristesse, de mon désespoir. Je priais pour qu’ils se réveillent un jour pour qu’on puisse enfin se revoir, se dire bonjour, passer de bons moments et surtout apprendre à nous connaître, commej’avais perdu une partie de ma mémoire je voulais en savoir plus sur ma vie d’avant.
Quatre mois après mon réveil, soudainement, c’était seulement alors, que quelque chose d’étrange se passait je le savais, je le sentais, c’est comme si quelqu’un m’observait jour et nuit pendant mon sommeil et qu’il intervenait dans mes cauchemars. Il portait une fleur blanche à sa main gauche qui ne se fanait jamais. Il était vêtu d’un costume et de gants noirs en cuir. Il apparaissait toujours à ce moment-là où nous voulions nous réveiller de notre cauchemar mais que quelque chose nous retenait. Certains de mes cauchemars se ressemblaient toujours, cette sensation de peur, cette fleur blanche et ce personnage qui me faisait froid dans le dos.

Quand j’étais seule à la maison, je me forçais à rester éveillée. Pour me changer les idées, je me faisais du poisson pané et des pâtes pour me sentir mieux. Oui, vous me direz pourquoi les pâtes ? Et bien tout simplement parce que je ne savais pas faire la cuisine mais seulement des pâtes que je mélangeais avec un pot de relish, une espèce de bouillie de légumes verts. Je m’affalais aussi sur le canapé et regardais la télé surtout une mini-série québécoise qui s’appelle Quadra et un film français de 1961 Snobs. J’aimais aussi lire Presto un magasin qui ne parlait que des musiques Rock. Mais même dans ces moments-là je sentais cette présence qui me suivait, c’est vrai, j’avais toujours cette présence qui me suivait, comme un fantôme qui venait me hanter, cette peur que j’avais en moi je l’avais toujours ressentie depuis l’accident ou peut être, avant, depuis toujours.
J’espérais que ces cauchemars ne reviendraient plus, que j’aurais une vie totalement normale. Gin était toujours là pour moi ; étant médecin, il me donnait des calmants tout ce dont j’avais besoin pour me sentir mieux mais ça empirait de plus en plus. Mes cauchemars devenaient vraiment étranges. On aurait dit que c’était la réalité, je me réveillais toujours en sueur ou en hurlant de toutes mes forces. Gin venait en courant à chaque fois que ça allait mal, il me rassurait et me calmait comme le ferait un père. Il était tout pour moi. En ce moment c’était lui dont j’avais le plus besoin. Je me rendormais avant de me réveiller et de voir mon frère ensanglanté dans une pièce totalement inconnue.
C’est à ce moment-là que j’ai compris à quel point j’étais devenue une créature cruelle. Une tueuse. Soudain je me mis à quatre pattes et les mains sur mes oreilles, j’entendais ce cri qui me faisait tellement mal aux oreilles. D’un coup tous les miroirs se brisèrent en mille morceaux. C’est à cet instant que je me souvins de quelques souvenirs. Mes souvenirs me revenaient comme par magie. Et cette petite voix dans ma tête qui me disait « Tue-les,tue-les tous ! » Depuis ma plus tendre enfance j’ai entendu cette voix, ces mots, « tuer ».
Plus je retrouvais la mémoire, plus ces souvenirs m’étaient étranges, on aurait dit que mes souvenirs se mélangeaient avec ceux d’une autre personne, pourtant ils m’étaient familiers. Je me regardais une dernière fois, c’était bien mon reflet mais je ne la connaissais pas, elle avait cet air que je ne connaissais pas, je ne savais pas qui elle était, elle avait ce sourire au coin de la bouche, je sentis un léger souffle qui effleurait mon cou et de vagues murmures à mon oreille. « Continue, tue-les, tue-les tous. Donne leur ce qu’ils méritent. ! »
Je paniquais, j’avais peur, qui était cette personne et moi qui étais-je vraiment ? Je tremblais tellement, je ne savais pas ce qui m’arrivait. Je criais pour qu’elle parte, je lui disais de partir je continuais à la chasser mais elle était là tout près de moi. Elle possédait mon corps ! Je voulais qu’elle parte et qu’elle me laisse tranquille. Même si ma mémoire n’était pas totalement revenue je savais que cette personne avait un lien avec moi mais lequel ? Je ne sais pas. Je parvins à examiner ce qu’elle portait, je reconnus alors ce bracelet c’est à ce moment-là que tous mes souvenirs me revinrent.
Cette fille qui me ressemblait comme deux gouttes d’eau était ma sœur jumelle, comment avais-je pu oublier que j’avais une sœur ? Je me souvins que lorsque nous étions petites, nous étions dans un orphelinat en Australie, nous étions toujours ensemble personne ne voulait jouer avec nous. A nous deux, on pouvait bien supporter les autres enfants qui ne voulaient nous faire du mal. Mais un jour, j’ai du partir en laissant seule Abelie, c’était ma sœur jumelle je devais la protéger mais je ne pouvais rien faire.
J’étais donc venue ici pour accomplir quelque chose que ma sœur n’avait pas pu finir car elle avait eu un accident. Mon frère Gin n’avait jamais été mon frère, cette maison et cette vie non plus n’avait jamais été la mienne. Ce monstre que j’étais devenue n’était pas moi mais ma sœur qui voulait se venger de toutes ces personnes. Abelie a eu une dure enfance, nos souvenirs s’étaient connectés à l’instant même où j’avais retrouvé la mémoire. C’est comme si nous ne faisions qu’une.

J’entendis soudain cette voix familière, la voix de ma petite sœur étant enfant, je me retrouvais donc dans mon ancien orphelinat, je revis nos moments passés ensemble dans cet orphelinat. Mais aussi son parcours depuis son départ de l’orphelinat, c’est à ce moment-là qu’elle avait vécu l’enfer. Elle avait été battue, maltraitée et pourtant elle garda toujours le sourire jusqu’à sa mort. Elle était morte le même jour où j’avais eu mon accident de voiture maintenant je regrettais tellement de l’avoir abandonnée, de l’avoir laissée derrière moi, de ne pas avoir pu la protéger, de ne pas l’avoir cherchée pendant toutes ces années et de l’avoir oubliée, ma précieuse sœur, ma seule famille.
Au bout d’un instant ma tête tournait, je commençais à avoir des bouffés de chaleurs. Une silhouette s’approcha de moi, je la vis de mes propres yeux c’était bien elle Abelie. Elle s’approcha de moi en me tenant la main pendant que moi je me sentais étouffée par terre en position du fœtus. Abelie s’approcha de moi et me murmura ces dernières paroles.

Je me réveillai en sursaut, m’assis et regardai autour de moi. J’étais dans un lit d’hôpital avec mon frère qui me tenait la main. Mes larmes commençaient à couler, mon frère me prit dans les bras et me rassura. Il alla chercher le docteur pour lui signaler que j’avais repris connaissance. Je sortis de mon lit et me regardai dans le miroir de la salle de bain. J’examinai mon corps, toutes les parties de mon corps, j’avais les mêmes blessures. Donc tout cela n’était que la réalité. Depuis ce jour, je n’ai plus revu ma sœur, ni fait de cauchemars. Je lui ai rendu visite sur sa tombe, elle n’avait pas de fleurs rien du tout. Je déposai alors une photo de nous deux étant jeunes.