En effet, vendredi 16 mars à 14h00, nous allons au Théâtre Maurice Sand assister à la représentation d’une pièce historique d’un auteur contemporain, Jean-Claude Brisville,
Jean-Claude Brisville imagine l’affrontement de Talleyrand et Fouché, un soir de juillet 1815, alors que la France, occupée par des troupes étrangères, après la défaite de Waterloo, hésite entre régime impérial, retour de la république ou restauration monarchique. Les deux hommes qui ont servi, comme ministres, et trahi Napoléon, sont sans illusions et sans scrupules. Selon les mots de l’auteur, ce sont des "forbans", "ces deux hommes à l’âme noire qui firent la France un soir de 1815." Tous deux veulent peut-être le salut de la France, mais surtout le pouvoir.
(…) Emmanuel Ray et Antoine Marneur s’en donnent à cœur joie. (…) Le numéro d’acteurs est fascinant, entrecoupé par les interventions du domestique interprété par Fabien Moiny. Discrète et efficace, la mise en scène de Mathieu Genet donne à la pièce une actualité brûlante.
Yves Bastide, L’Echo Républicain
F.B. Talleyrand et Fouché, tels que vous les mettez en scène dans Le souper, sont intemporels... Etonnamment contemporains, même...
J.-C.B. Oui. Mais c’est seulement aujourd’hui que je me rends compte de cela. En écrivant la pièce, je ne voyais que ces deux hommes qui réglèrent le sort du pays et sur lesquels Chateaubriand avait écrit de si belles pages. Je me souviens que François Mitterrand, lorsqu’il a vu la pièce, fut médusé : il ne m’a pas adressé la parole après la représentation, manifestement furieux...
N.B. Le Souper a été écrite en 1989.
F.B. Comment écrit-on une pièce aussi brillante que Le Souper ?
J.-C.B. Vite. Très vite. J’ai écrit Le Souper en trois jours et quatre nuits. Dans un état d’excitation totale. J’avais connu Claude Rich en vacances, chez un ami commun. Nous avons sympathisé. J’avais déjà Le Souper en tête et en écoutant parler Claude Rich, je le voyais en Talleyrand. Même en slip de bain, Rich était Talleyrand. J’ai écrit la pièce en pensant à lui. Je la lui ai envoyée. Il m’a rappelé du Maroc où il tournait un film et m’a dit : « J’ai lu ta pièce cette nuit. J’étais couché. Eh bien, à la fin de ma lecture, je me suis relevé et j’ai salué... » C’est Claude Rich qui a eu l’idée de proposer à Claude Brasseur le rôle de Fouché.
N.B Claude Rich et Claude Brasseur ont été les premiers interprètes de la pièce.
F.B. Trois jours ! C’est impossible...
J.-C.B. Si, la première version. Il y en a eu six ou sept. Je laissais passer deux mois entre chaque version. Je coupais. C’était à chaque fois beaucoup de travail. Mais chaque version ne me prenait jamais plus de quinze jours, très intenses. J’ai écrit Le Souper chez moi, sur des dos d’enveloppe et sur des prospectus. J’étais membre du jury du Conservatoire et je venais de lire le portrait de Fouché par Stefan Zweig ; en rentrant chez moi, j’ai commencé à écrire la pièce sur des bouts de papier. J’étais pris d’une sorte de vertige. C’est pour cela que j’ai écrit si vite, en me disant que si j’attendais une heure seulement je risquais d’être bloqué, que je ne pourrais pas aller plus loin... J’écris poussé par l’angoisse de ne pas y arriver. Je suis comme sur un fil, au-dessus de l’abîme, me disant : « Si le fil se casse, je tombe dans le fond. » Une pièce de théâtre s’écrit à toute vitesse ou ne s’écrit jamais.
F.B. Qu’est-ce qu’une pièce réussie ?
J.-C.B. Je crois qu’il y a deux fondamentaux, comme on dit dans le rugby, deux lois que tous les auteurs doivent respecter. D’abord, le conflit. Il faut un conflit fort. Dans les romans, les conflits peuvent se dérouler par l’intermédiaire d’une narration ou de deux monologues parallèles, on parle chacun pour soi, sans forcément s’opposer. Mais au théâtre, le conflit doit absolument apparaître dès les premières lignes. Ensuite, l’évolution des personnages. Les personnages ne doivent pas être les mêmes à la fin qu’au début ; ils doivent évoluer et s’opposer. Tous les auteurs dramatiques ont respecté ces règles, même Beckett.
F.B. Quels sont les pièges à éviter, lorsque l’on écrit du théâtre ?
J.-C.B. Je crois qu’il faut se garder de la tentation du pittoresque. Il faut serrer de très près les personnages, ne rien inventer mais trouver, découvrir, dans leur histoire personnelle, ce qui créera et entretiendra l’opposition.
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Dernière mise à jour : lundi 24 janvier 2022