Publié : 2 février 2015
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Une adaptation théâtrale qui fait réfléchir.

Le roman de Roy Lewis Pourquoi j’ai mangé mon père publié en 1960 est un vrai questionnement sur notre monde, le progrès et le devenir de l’Homme. Ainsi nous pouvons nous demander si une une adaptation en pièce de théâtre de cette oeuvre est possible. Le comédien et metteur en scène Damien Ricour a tenté l’expérience.

L’Histoire

L’oeuvre, un roman anglais, a tout d’abord été traduite en français et se retrouve maintenant réécrite en pièce de théâtre. Il est donc évident que l’histoire a subi quelques changements. En effet, une grande partie de l’histoire originale est passée sous silence pour se focaliser sur l’aventure entre Edouard et Ernest, un père et son fils, racontée à travers les souvenirs d’Ernest.

Par ailleurs, le texte de la pièce comporte beaucoup de répliques du livre : des répliques cultes comme le fameux "Back to the trees" de l’Oncle Vania, ou simplement des citations qui apparaissent par-ci par-là.

On peut remarquer enfin quelques petit détails qui varient entre la pièce et le roman, comme le nom de la femme d’Edouard qui de "Mathilde" devient "Rosita" en souvenir, nous a confié Damien Ricou de sa grand-mère. Mais ces changements dans l’histoire sont acceptables du fait de la richesse de l’oeuvre et du temps imparti pour la jouer.

La Mise en Scène

En apprenant que la pièce est jouée par un seul acteur, nous commençons à nous poser des questions. Mais le jeu de l’acteur est très bien assuré ; nous n’avons pas le temps de nous ennuyer.

L’acteur n’a pas de costume à proprement parler ; il lui arrive seulement quelquefois d’arranger l’habit qu’il porte pour changer de personnage. Cependant, le personnage principal, Ernest, possède un manteau et un chapeau que l’acteur ôte au début de la pièce et remet à la fin pour différencier le présent et le passé. Je dois avouer que je trouve ce petit détail assez intéressant, car il montre, métaphoriquement, comment on peut se juger soi-même rétrospectivement bien naïf en repensant à un événement passé, à travers le regard de ce que l’on est aujourd’hui.

L’espace scénique est bien utilisé ; en effet, le comédien est très dynamique, toujours en mouvement, se déplaçant sur toute la scène ; il lui est même arrivé de descendre dans le public. L’acteur gère lui-même une partie des effets de lumière, ce qui ne ralentit nullement la pièce, mais lui donne encore plus du rythme !

En outre, tout comme pour les costumes, les accessoires se comptent sur les doigts de la main. Ainsi, l’acteur fait lui-même la musique et les bruitages, très explicites en contexte, et qui permettent de nous faire comprendre les situations encore mieux que s’il y avait eu des accessoires.

Le Comique

Le principe du roman de Roy Lewis repose essentiellement sur le rire pour faire passer des idées et nous faire réfléchir. Il est donc tout à fait normal que la pièce soit d’autant plus hilarante que nous la voyions sous un autre angle qui est plus adapté pour le rire.

Tout d’abord, dés le début du spectacle, l’acteur nous met en condition avec des imitations, ce qui donne envie de rire. Ainsi, par la suite, nous sommes fin prêts à écouter de bonne oreille les propos tenus. Les bruits et musiques produits par l’acteur sont très divertissants. Mais ce n’est pas tout, il faut également compter sur les voix prises par l’acteur pour incarner les différents personnages qui sont stéréotypés, le jeune enfant, la jeune femme...

Si ce n’était pas suffisant pour briser la glace, les mimiques que fait Damien Ricour pour se mettre dans la peau d’un personnage finissent de la briser. De plus, pendant son spectacle, l’acteur laisse une part importante à l’improvisation ; ainsi, il peut se mettre à faire un peu ce qu’il veut comme descendre voir le public et créer une connivence avec lui, en l’interpellant pour le faire rire.

Enfin, cette interprétation met en valeur certains aspects de l’oeuvre, en accentuant, par exemple, davantage que dans le roman la sentimentalité d’Ernest ; ainsi, nous ne pouvons rester de marbre quand le père s’exclame « oula ! » après que le petit a fait part de ses impressions sur sa "fiancée", ce qui nous ramène une nouvelle fois à nous interroger sur la différence de penser de chacun.

Pour conclure,

la pièce ne plait pas forcément à tout le monde, mais dans la majorité des cas, elle touche ! Chacun est, en effet, interloqué par au moins un aspect du spectacle qui va le faire se questionner sur sa signification.

Ainsi, nous pouvons dire que la forme théâtrale a su jouer son rôle.